L’Indian Scout Bobber et les autres custom de la gamme Scout actuelle reprennent le nom d’une moto qui marqua très profondément le paysage motocycliste américain de l’entre-deux-guerres. Les Scout vintage sont d’abord des motos qui conjuguent facilité de prise en main et performance. Grace à leur extrême polyvalence et un V-Twin bien né, ces motos sont un pan de l’histoire d’Indian. Elles s’illustreront aussi bien en compétition que sur les champs de bataille européens.
1 – L’Indian Scout (1920-1927)

L’Indian Scout sort à l’automne 1919 et est dessinée par le pilote de renom et ingénieur d’origine irlandaise Charles B. Franklin. Ce dernier avait la charge du département technique suite au départ en 1913 de Carl Oscar Hedstrom, l’un des deux fondateurs d’Indian avec George M. Hendee.
En matière de moto du moins américaine, il y aura un avant et un après la Scout.
Cette moto imaginée par un européen est fiable, très facile pour les débutants et les petits gabarits et s’avère performante malgré sa faible cylindrée pour une américaine.
Son cadre double-berceau avec réservoir entre-tubes accueille un V-Twin de 37 cui (606 cm3) délivrant 11 chevaux. Ce manque de puissance par rapport à l’Indian Powerplus 1000 cm3 apparue en 1916 est compensé par un poids plume de 154 Kg contre 200 Kg pour son ainée.
La Scout peut donc filer à vos risques et périls à près de 100 Km/h sur les anciens trails de la conquête de l’Ouest et rivalise sans aucun mal avec les plus puissants V-Twin 1200 cm3 de l’époque dans ces conditions.
Au niveau technique, l’ingénieur irlandais prouve sa maestria car la transmission primaire est formée de trois pignons hélicoïdaux placés dans un carter étanche.
Ce choix, dont les qualités sont proches d’un bloc moteur, apporte à la Scout une grande rigidité structurelle par rapport à la concurrence équipée de boîte séparée.
Hormis BMW, il faudra attendre 1957 pour que des constructeurs motos grand public, Triumph et Harley-Davidson avec le Sportster adoptent une motorisation que les anglo-saxons appellent « Unit ».
La partie-cycle de l’Indian Scout peut être jugée comme classique avec une fourche à lames et un cadre rigide.
2 – Indian Scout 101 (1928-1931)
En 1927, Charles Franklin dessine une nouvelle partie-cycle digne de son extraordinaire bicylindres. Ce chef d’œuvre motocycliste se nomme : Indian Scout 101. Cette moto sera déclinée en deux cylindrées : 610 cm3 (37 cui) et également 740 cm3 (45 cui) afin de concurrencer l’Excelsior Super X.
Soichiro Honda en possédera une durant de nombreuses années ce qui lui donnera l’idée de construire ses propres motos…
Cette moto est louée aussi bien pour sa tenue de route exceptionnelle que pour son V-Twin de 750 cm3 donnant un rapport poids-puissance de 18 chevaux pour 130 Kg.
De facto, cette moto est la sportive au sein de la gamme Indian qui propose de gros V-Twin avec la Chief mais aussi un 4 cylindres de 1220 cm3 suite au rachat de la firme Ace Motorcycles. Nombreux qualifieront la Scout 101 de « meilleures Indian jamais construite ».
De nos jours, cette bonne fille est toujours utilisée dans les exhibitions de type « mur de la mort ».
3 – Scout Pony (1932-34) & Motoplane (1933)
Ces deux motos qui ne différent que par leur cylindrée, 500 cm3 pour la Scout Pony et 750 cm3 pour la Motoplane, ne feront pas oublier la Scout 101.
Toutes deux seront des échecs patents pour la firme de Springfield. Ainsi, la Motoplane ne restera au catalogue que durant l’année 1933. En 1935, la Scout Pony est rebaptisée Junior Scout.
Également surnommée « Thirty-Fifty » en raison de sa cylindrée en mesure impériale (30,5 cubic inches soit 500 cm3), elle apporte son lot d’innovations au niveau de la partie-cycle : cadre rigide de type diamant à simple berceau et fourche Girder à un seul ressort hélicoïdal empruntée à l’Indian Prince 350 cm3.
4 – Standard Scout (1932-1937 )
Le krach boursier de 1929 et la grande dépression qui suit font des ravages au sein de l’industrie motocycliste américaine. Ainsi, le troisième constructeur américain Excelsior ferme ses portes en septembre 1931.
En 1932 et face à la crise économique qui sévit, Indian réduit la voilure. Afin de diminuer les coûts de production, Indian conçoit un châssis commun aux trois gammes : Scout, Chief et Four. La Scout 101 est remplacée par la Standard Scout.
Fort logiquement, cette nouvelle machine s’avère plus lourde et plus pataude que sa devancière. Les aficionados de l’agile Scout 101 manifestent leur mécontentement auprès des dealeurs et désirent ardemment son retour. Sinon, ils iront voir du coté de la concurrence, comprenez Harley-Davidson et sa RL 45 ancêtre direct de la WL 750.
1932 marque également le décès prématuré de Charles B. Franklin âgé de seulement 52 ans et le déclin à venir du constructeur de Springfield.
5 – Sport Scout (1934-1942)
Le directoire d’Indian fait le constat que le constructeur doit avoir au sein de son catalogue une Scout affutée à l’image de la Scout 101.
La routière
Cette moto conserve un rustique V-Twin à distribution latérale de 750 cm3 qui reçoit une pompe à huile aller-retour. Par souci d’économie, la Sport Scout rentre dans le rang et adopte une transmission primaire par chaîne triplex.
Cette moto renoue avec la sportivité de la Scout 101 d’antan. Son poids demeure contenu (168 kg) alors que son flathead de 750 cm3 délivre 20 chevaux.
Niveau partie-cycle, l’Indian Sport Scout adopte :
- Une fourche Girder ;
- Le cadre rigide diamant (ou « keystone » aux USA) de la Scout Pony et de la Motoplane ;
- Des jantes en 18 pouces à l’avant comme à l’arrière ;
- Un freinage avant et arrière à tambour.
En 1940 et pour se différencier des Harley-Davidson, la Sport Scout s’embourgeoise en adoptant des garde-boue enveloppants puis en 1941, une suspension arrière à tubes coulissants.
Après-guerre, l’Indian Sport Scout sera choisie par de très nombreux bikers pour réaliser un bobber du fait du nombre de pièces racing développées pour son utilisation en compétition.
La compétition
Pour des besoins commerciaux et d’image, le constructeur de Springfield doit impérativement se doter d’une nouvelle moto performante. En effet et depuis 1934, la fédération motocycliste américaine ou AMA a instauré la Class C, censée limiter une escalade technique.
A travers les courses de flat track de Class C, les V-Twin Flathead Harley et Indian s’illustrent avec au guidon des pilotes anonymes lors de centaines de courses locales qui se tiennent chaque dimanche mais également lors des grandes classiques.
Ces résultats en course
Ainsi, Ed Kretz, surnommé « Iron Man », remporte les 200 Miles de Savannah en 1936 puis l’année suivante la première édition des 200 miles de Daytona.
Parmi les très nombreux records de vitesse réalisés, en 1938, Fred Ludlow atteint 185 Km/h au guidon d’une Sport Scout Class C sur le Lac Salé de Bonneville (Utah).
6 – Modèle 741
Dans la hâte, Indian fournit aux alliés 38.000 motos dérivées de la Junior Scout ou Fifty Five ( 30,5 cui ou 500 cm3). Cette moto reçoit la boîte de vitesse de Chief, une fourche à parallélogramme alors que son cadre est rehaussé.
A titre de comparaison, Harley-Davidson construira autour de 90.000 WLA 750 ou 45 cui et assez de pièces pour en fabriquer 30.000 de plus !
Suite à la crise de 1929, Springfield avait dû se séparer de machines outils afin d’équilibrer ses comptes. En bien meilleure santé, la Motor Compagny peut fournir tout à la fois des motos aux militaires mais également aux civils, chose que ne peut faire Indian.
L’Indian Model 741 sera la principale contribution d’Indian à l’effort de guerre. Cette moto est dérivée de la Junior Scout ou « thirty-Fifty ». Son taux de compression est revu à la baisse et elle reçoit des lois de distribution moins efficientes. Elle est donc plus apte à accepter les essences à faibles taux d’octane rencontrées en Afrique du Nord. Cette baisse du rendement du V-Twin de 500 cm3 la rend également plus fiable et ses démarrages sont plus aisés.
Malgré un embonpoint certain (205 kg) et une puissance modeste (15 ch), elle tutoie les 100 Km/h et sera principalement versée dans l’armée britannique et les forces du Commonwealth.
En novembre 1940, la Luftwaffe rase la ville de Coventry et détruit les usines Triumph. Le ministère de la défense britannique qui ne veut pas se trouver à cours de motos passe une commande de 5000 Indian 741.
7 – Modèle 640-B
Le modèle 640B est animé par le V-Twin de 750 cm3 de Scout Sport. Cette moto confidentielle, puisque produite à seulement 2500 exemplaires, restera stationnée aux États-Unis.
Tout comme pour la 741, les garde-boue enveloppants sont abandonnés et elle est recouverte de pied en cap de la couleur réglementaire de l’US Army : le vert olive ou olive drab.
Équipée du flathead de 750 cm3 de 22 ch. et servie par une boîte à 3 rapports, cette moto de 200 Kg peut prétendre à 120 Km/h en pointe.
8 – Indian 648 Big Base Scout : Le baroud d’honneur (1948)
Après-guerre, le sport motocycliste reprend progressivement ses droits. En 1948, l’usine de Springfield met en chantier un lot de 50 exemplaires de la Scout racer dite « Big Base » de 1939. Les « 648 Big Base Scout » rivaliseront sans mal avec les Harley-Davidson WR750 en flat track comme en vitesse.
Ainsi, la Scout racing pilotée par John Spiegelhoff remporte la première édition de l’après-guerre de la Daytona 200.

En 1948, Floyd Emde s’impose à son tour lors de la classique floridienne. Indian fait la barbe à Harley-Davidson sur les anneaux en terre battue puisque Bobby Hill remporte le titre Grand National AMA 1951, 1952 et Bill Turman celui de 1953, ce qui clôture l’épopée sportive et industrielle du constructeur de motos américaines.
De manière officieuse, le racer Indian continuera à s’illustrer en dirt track lors de courses locales jusqu’au milieu des années 60.
1967 – Burt Munro : Indian Scout never died
En 1967, Burt Munro réussit l’exploit d’amener son Indian Scout de 1920 à 296,1 km/h sur le Lac Salé de Bonneville alors qu’il est âgé de 68 ans ! En 2005 et à travers le prisme du cinéma, Anthony Hopkins endosse le rôle du pilote néo-zélandais au guidon de son streamliner de 950 cm3.
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