Easy Rider fête ses 50 ans !

1969 ne fut pas simplement l’ « année érotique » chantée par Gainsbourg et Birkin. Ce fut également les premiers pas de l’Homme sur la Lune et plus prosaïquement pour un site qui parle de moto, l’année de commercialisation d’une moto révolutionnaire : La Honda CB 750.

A mi-chemin entre art et moto, 1969 marque également la sortie de « Easy Rider ».

Pour fêter cet anniversaire, 400 salles aux USA diffusent une version restaurée de ce film qui inventait un genre cinématographique : Le road movie.

Pour Dennis Hopper (Billy) qui réalise le film et tout comme pour Peter Fonda (Wyatt), Easy Rider est un western des temps modernes où les deux protagonistes ont troqué leurs chevaux pour des choppers.

Tout a été dit sur les pérégrinations des deux motards qui traversent les USA de Los Angeles à La Nouvelle Orléans pour s’encanailler durant le carnaval.

Un chopper qui annonce la couleur

Ainsi, le fameux Panhead à cadre rigide piloté par Peter Fonda est surnommé Captain America. Ce nom fait référence au super-héros patriotique Marvel commandé par le Pentagone en 1940 afin de soutenir le moral des troupes.

chopper easy rider captain america

A travers ce simple détail, on comprend aisément que Easy Rider est une charge contre la politique menée par les États-Unis dans le Sud-Est asiatique.

Le réservoir peint aux couleurs du drapeau américain et le casque Bell enfoncent un peu plus le clou sur le message du road movie.

John Wayne, l’acteur qui incarne mieux que quiconque le western, avait joué et produit : « Les Bérets Verts ». Celui que l’on surnommait « The Duke » et qui s’était fait porté pâle durant la seconde guerre mondiale, tentait de justifier par ce film l’intervention américaine au Vietnam.

Par réaction à ce nanar fascisant, Peter Fonda avait cousu un drapeau américain sur le dos de son blouson afin d’exprimer qu’il existait d’autres valeurs américaines que celles que prônaient John Wayne. La police de Los Angeles verbalisait régulièrement Fonda pour outrage aux couleurs.

De ce harcèlement des hommes du L.AP.D germa l’idée de peindre le réservoir Mustang du chopper de Peter Fonda aux couleurs de la bannière étoilée.

Le film

Les deux anti-héros d’Easy Rider portent des prénoms mythologiques de la conquête de l’Ouest : Wyatt (Earp) et Billy (le kid).

Le film s’inscrit dans la veine des grands récits américains mêlant voyages et aventures écrits notamment par Jack kerouac ou Jack London.

Wyatt et Billy partent à la découverte de « la grande et sainte Amérique encore préservée des hommes », décrite vingt ans plus tôt par Kerouac dans « Sur la Route ».

Jack Nicholson Easy Rider
Easy Rider sera un tremplin pour un acteur hors norme : Jack Nicholson. Il avait déjà tourné dans un biker movies ou B-movie : « Hell’s Angels On Wheels » (1967).

Cette épopée motocycliste sur la Route Dixie se fait donc à contre-sens de la conquête de l’Ouest ; tout un symbole !

Wyatt et Billy, grâce à une revente de cocaïne à Los Angeles (l’acheteur en Rolls Royce est joué par Phil Spector, qui produira des albums des Beatles, des Doors ou des Ramones), acquièrent la liberté financière et donc la Liberté tout court.

Ils peuvent désormais entreprendre leur road trip (En Europe, on parlerait d’Odyssée) à travers l’immensité des paysages et des espaces américains avec « rien derrière et tout devant, comme toujours sur la route » (Jack Kerouac – Sur La Route).

En chemin, nos deux bikers quelque peu candides (mais n’est-ce pas un pléonasme du mouvement hippie ?) vont rencontrer un avocat des droits civiques (Jack Nicholson) qui noie sa trop grande lucidité dans les vapeurs d’alcool.

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Il leur décoche une phrase expliquant l’autre grand sujet du road movie  :

« Ils vont te parler sans arrêt de liberté individuelle mais s’ils voient un individu libre, ils prennent peur. »

Car oui, Easy Rider est également une ode à la LIBERTÉ.

Jack Nicholson résumera la portée politique d’Easy Rider par ces mots :

« C’est dur d’être libre quand on est un produit acheté et vendu au marché. ».

On ne peut s’empêcher de mettre en parallèle cette phrase avec le demi-million de jeunes gens combattants en 1969 au Vietnam afin de faire prospérer le complexe militaro-industriel américain…

La réplique de Fonda à la fin du film, « On a déconné », fait le deuil d’une Amérique bâtie autour du mot Liberté et des utopies de la Beat Generation.

dennis Hopper Peter Fonda Easy Rider

Nos deux motards sur leurs machines peu académiques effrayent les péquenots qui se chargeront de régler leur compte quelque part dans le Sud profond. L’Ouest sauvage et ses hommes libres prennent désormais la poussière dans les livres d’histoire.

Easy Rider tua quelque part le western puisque Hollywood ne produira quasiment plus aucun film de ce genre après le biker movie…

Le rêve américain se cantonnera à la vente d’électroménager pour la ménagère de moins de 50 ans et à larguer des tombereaux de bombes sur le Vietnam.

Tout le monde connait la moto d’Easy Rider…

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Cliff Vaughs

D’un point de vue motocycliste, on regrettera que l’afro-américain Cliff Vaughs, un temps producteur associé et qui imagina la Captain America, véritable totem de la Liberté, ne soient pas au générique de la version restaurée.

Vous pouvez découvrir l’histoire mouvementée de cette moto dans cet article : Hommage à l’un des créateurs de la Captain America d’Easy Rider.

L’héritage de Easy Rider

Easy Rider reçut le prix de la Première œuvre lors du Festival de Cannes 1969. « Ce petit film qui tua les gros film » (dixit Time Magazine) avait couté 340 000 dollars et en remportera pas moins de 50 millions !

easy rider 1969 Festival de Cannes
Festival de Cannes 1969

1969 marque la naissance du « nouvel Hollywood » puisque trois films indépendants, « Le Lauréat », « Bonnie & Clyde » et bien sûr « Easy Rider » trusteront les trois premières places du box office.

Ce film a mal vieilli du fait de longueurs et d’errances scénaristiques malgré une écriture à trois mains (Fonda, Hopper et Terry Southern). Ce vent frais inspirera malgré tout de jeunes réalisateurs comme Martin Scorsese, Robert Altman, Terrence Malick, Brian De Palma et bien d’autres.

Easy Rider est également la première œuvre cinématographique à utiliser une bande originale ( B.O.) en béton avec l’iconique « Born To Be Wild » de Steppenwolf.

On retrouvera une narration qui s’appuie sur le rock dans « Les Affranchis » ( Martin Scorsese -1990) et que l’on retrouve également dans Trainspotting (Danny Boyle – 1996) ou Pulp Fiction ( Quentin Tarantino – 1994).

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Laurent Blasco-Calmels

Laurent, passionné par les belles mécaniques en tous genres & curieux des nouvelles technologies. Ex journaliste & auteurs de plusieurs livres bien avant que cela soit "trendy".

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